Union Sacrée : Aimé Boji en lice pour la présidence de l’Assemblée

KINSHASA – L’Union sacrée de la nation a officialisé ce mercredi 20 octobre 2025 son choix pour la présidence de l’Assemblée nationale : Aimé Boji Sangara, qui succédera à Vital Kamerhe après sa démission.

L’annonce a été faite par le professeur André Mbata, secrétaire permanent de l’Union Sacrée, lors d’une conférence de presse tenue au siège du regroupement politique à Kinshasa.

« Je suis heureux de vous annoncer que l’Union Sacrée de la nation présentera à l’élection au poste de président de l’Assemblée nationale l’honorable Boji Sangara Aimé, candidat numéro un sur la liste des dossiers dans l’ordre alphabétique. Il sera donc, à partir de cet instant, le candidat de l’Union Sacrée de la nation pour présider l’Assemblée nationale », a déclaré André Mbata.

Le calendrier officiel des élections à la tête de la chambre basse du Parlement devrait être annoncé dans les prochains jours, marquant le lancement formel de la course pour un poste stratégique dans la vie politique congolaise.

LIRE AUSSI : https://www.journaldekinshasa.com/boji-sangara-officialise-ses-ambitions-pour-le-perchoir/

Uniforme et amour interdit : le procès qui divise l’armée Congolaise

KINSHASA – Dans l’enceinte austère du camp Kokolo, le tribunal militaire de Kinshasa-Gombe s’apprête à rendre son verdict. Sur le banc des prévenus, l’adjudante Béanche Ebabi, visage fermé, attend que la justice décide de son sort. Son crime ? Avoir posé en tenue militaire, aux côtés de son fiancé, pour une séance photo destinée à immortaliser leurs fiançailles.

Les images, tendres et impudiques à la fois, montrent la militaire arborant son grade, enlacée à l’homme qu’elle devait épouser ce 31 octobre. Des clichés de baisers, de regards complices, volés dans l’intimité d’un studio de Matonge. Devenus viraux, ils ont déclenché une onde de choc dans la hiérarchie militaire.

Dix ans de prison requis pour « déshonneur »

Lors de l’audience précédente, la réquisition du parquet a cinglé l’atmosphère du prétoire : dix années de détention pour « violation des consignes ». Le sous-lieutenant magistrat Ghislain Lisalama, représentant le ministère public, a fustigé un « comportement qui déshonore l’armée », enfreignant délibérément le télégramme du chef d’état-major général interdisant toute publication de militaires en tenue sur les réseaux sociaux.

La défense contre-attaque : le photographe en ligne de mire

Face à l’accusation, la prévenue a adopté une ligne de défense claire : elle reconnaît la séance photo, mais nie fermement avoir publié les clichés. « C’est le studio qui les a divulgués sans mon consentement », affirme-t-elle. Ses avocats, menés par le sous-lieutenant Alpha Anangame, ont exigé la comparution du photographe, seul « auteur présumé de la publication ».

Une requête partiellement entendue : le major Safari Christian, président du tribunal, a suspendu l’audience pour permettre aux gérants du studio RawSur de venir témoigner. Une pièce manquante qui pourrait changer la donne.

Un procès « pédagogique » aux enjeux démesurés

Ce procès, traité en flagrance, dépasse la simple affaire disciplinaire. Il se veut « pédagogique » pour l’ensemble des Forces armées, à l’heure où chaque smartphone peut devenir une tribune incontrôlable. Le télégramme de 2021, brandi comme preuve absolue, interdit formellement tout contenu pouvant « porter atteinte à l’honneur, à la dignité et à la crédibilité des FARDC ».

Pourtant, la disproportion de la peine requise – dix ans pour des photos de mariage – interroge. L’adjudante Béanche Ebabi, secrétaire adjointe du département de sécurité militaire, voit aujourd’hui sa carrière et sa vie privée s’effondrer pour avoir mêlé l’uniforme sacré et les sentiments les plus intimes.

Alors que le verdict est attendu dans l’après-midi, une question plane dans le prétoire : l’armée congolaise veut-elle sanctionner une faute, ou faire un exemple ? La réponse déterminera le destin d’une femme, mais aussi les limites de la discipline militaire à l’ère du numérique.

Le hold-up de la place Victoire et l’énigme des 10 500 dollars

KINSHASA – Dans le prétoire, l’accusation dessine les contours d’un casse méthodique : une bande organisée, un braquage ciblé, une banque dévalisée. Mais depuis le début de l’instruction, mardi 28 octobre 2025, c’est une tout autre version qui émerge, plus trouble, où les rôles de prédateurs et de victimes semblent se brouiller. Au cœur des débats, une énigme : que sont devenus les 10 500 dollars volés à l’agence Rawbank de la place Victoire ?

LIRE AUSSI : https://www.journaldekinshasa.com/rawbank-le-braquage-dune-mere-a-bout-de-souffle/

Les trois prévenus, dont Honorine Porche, pointent unanimement du doigt les hommes en uniforme. L’argent ? Saisi par les agents de l’ordre lors de l’interpellation, affirment-ils. La présumée braqueuse raconte une arrestation violente. « Les agents m’ont battue avant de s’emparer du sac contenant l’argent, puis m’ont arrêtée », témoigne-t-elle, dessinant les contours d’une scène où la force policière aurait basculé en opportunisme pur.

Le chef de la sécurité accuse à son tour

Le doute s’installe davantage avec la déposition de l’AC Kashama, pourtant chef de poste de la sécurité de la banque ce jour-là. Son témoignage est une bombe. Il désigne nommément les unités impliquées : la « Task Force » et une autre unité seraient, selon lui, les seules à connaître la destination finale des 10 500 dollars. Une accusation grave, qui jette une ombre sur l’intégrité de l’opération policière.

Un double procès pour une même affaire

L’affaire est si trouble qu’elle a engendré une procédure judiciaire parallèle. La Cour militaire s’est saisie des sévices infligés à Honorine Porche lors de son arrestation. Pourtant, dans le prétoire civil, un détail interpelle : la victime des violences affirme ne reconnaître aucun de ses agresseurs parmi les forces de l’ordre présentes. « Je n’ai vu au procès aucun policier parmi ceux qui m’ont battue », constate-t-elle, amère.

L’étrange répartition des charges

Face à la justice, tous les prévenus sont poursuivis pour « association de malfaiteurs » et « terrorisme ». Mais le ministère public a réservé une inculpation supplémentaire, et exclusive, à Honorine Porche : « vol à main armée ». Selon l’accusation, les accusés auraient formé une bande structurée dans le seul but de dévaliser la Rawbank.

Pourtant, au fil des audiences, c’est bien le récit officiel qui semble se fissurer. L’argent a-t-il été récupéré par la banque ? A-t-il disparu dans les poches des braqueurs ? Ou, comme l’affirment les principaux suspects, a-t-il été confisqué par ceux-là mêmes chargés de le restituer ? À la place Victoire, le temple de l’argent, le procès du braquage est en train de se muer en une enquête sur la probité des uniformes.

Un nouveau parti pro-Kabila suspendu pour « trahison »

KINSHASA – La machine administrative avance, implacable. Par un arrêté signé ce mardi 28 octobre 2025, le vice-premier ministre et ministre de l’Intérieur, Jacquemain Shabani, a suspendu les activités de l’Alliance des Travaillistes pour le Développement (ATD).
Le parti de José Makila Sumanda est accusé d’avoir participé, à Nairobi, à une réunion jugée « ennemie » de la nation.

Un lien présumé avec le camp Kabila et la rébellion du M23

Selon le gouvernement, la présence de l’ATD à ce conclave, organisé sous la houlette de Joseph Kabila, franchit une ligne rouge. L’ancien président, condamné à mort par contumace pour des faits liés à la rébellion du M23, incarne désormais la figure du « traître » aux yeux de Kinshasa.

Le document ministériel, rédigé dans un ton inhabituellement virulent, ne se limite pas à un simple rappel des textes. Il dénonce une « philosophie d’agression du pays ».
Un conseiller de Kabila aurait déclaré que les objectifs du M23 et ceux de l’ancien chef de l’État « convergent ». En rejoignant ce courant, José Makila et son parti auraient porté atteinte à « l’unité nationale et à la souveraineté de l’État ».

Une offensive juridique contre l’ancien régime

La suspension de l’ATD s’inscrit dans une stratégie plus large. Depuis plusieurs mois, le pouvoir multiplie les actions contre les structures héritées du kabilisme.
Il y a quelques jours, le Tribunal de grande instance de Kinshasa/Gombe a signifié la suspension du PPRD, le parti historique de l’ancien président. Faute de siège officiel, la décision a été publiée au Journal officiel, une première dans les annales politiques du pays.

Déjà en avril, le gouvernement avait gelé les activités du PPRD. Il reprochait à Kabila son « silence complice » face à l’agression rwandaise dans l’Est, assimilé à une approbation tacite.

Une guerre politique à fronts multiples

La suspension de l’ATD confirme la stratégie de neutralisation totale du camp Kabila. En frappant successivement le PPRD puis l’ATD, Kinshasa ferme toute voie de reconstitution de l’opposition autour de l’ancien régime.
Le dialogue de Nairobi, considéré comme une tentative de front commun anti-gouvernemental, est désormais assimilé à un acte de trahison.

La guerre ne se limite plus aux collines du Nord-Kivu. Elle s’étend désormais au terrain politique et juridique. Le pouvoir utilise la loi comme une arme, redéfinissant, à coups d’arrêtés, les limites de l’opposition tolérée.
Pour l’ATD, la suspension marque peut-être la fin d’une ère — ou le début d’une nouvelle bataille.

RawBank : Le braquage d’une mère à bout de souffle

KINSHASA – Son silence était aussi lourd que ses aveux. Ce mardi 28 octobre, devant le Tribunal militaire de garnison de Kinshasa, Honorine Porsche Mukuna Onake, accusée d’avoir braqué l’agence RawBank de la Place de la Victoire, a reconnu l’ensemble des faits. Mais dans sa bouche, le récit du forfait prend des allures de cri d’alarme.

« C’est la souffrance qui m’a conduit à poser cet acte », a-t-elle déclaré, le regard droit, face à des juges en uniforme. Cette mère de quatre enfants, de nationalité allemande, raconte une chute : des dettes « énormes » en Europe – 20 000 euros –, l’impossibilité de nourrir sa famille, puis ce voyage au pays natal dans l’espoir d’une aide.

Son ultime recours ? Denise Nyakeru, la Première dame. « Ma grande sœur m’a conduit à la Fondation Denise. On m’a fermé la porte. » Le rejet, puis la dépression. « Au bout de l’espoir », elle achète « un jouet d’arme » – une réplique – et passe à l’acte, seule. « Je ne voulais faire du mal à personne. »

Dans le box, elle tente d’innocenter les autres prévenus : deux policiers, deux agents de gardiennage, tous inconnus pour elle. « J’ai pitié pour ces gens traînés ici. Ils n’y sont pour rien. » Même le motard qui l’a conduite ignorait tout, affirme-t-elle. Quant à l’argent volé, il aurait été « pillé par les éléments de la Police » intervenus sur les lieux.

Une affirmation qui a poussé le parquet à réclamer l’audition de la police militaire et de la Task Force. Le major magistrat Radjabu a sollicité leur comparution pour « éclairer le tribunal sur la destination de l’argent cambriolé ».

Désormais, sept noms figurent dans cette affaire née le 16 octobre dernier. Cinq présents, deux en fuite – Kapi et Benjamin. Tous sont poursuivis pour association de malfaiteurs, vol à main armée et… terrorisme.

Mais au-delà des charges, le procès d’Honorine Porsche est devenu celui d’une certaine misère sociale. Celle qui pousse une mère au bout d’elle-même, celle qui transforme un jouet en arme et un acte désespéré en crime militaire. La justice, désormais, doit trancher : jugera-t-elle la délinquante ou la détresse ?

Grands Lacs : Le pari diplomatique de la France

PARIS – Ils viennent de Washington, de Doha, de Luanda. Ce jeudi 30 octobre, la France réunit autour d’une même table près de soixante pays et organisations internationales pour tenter de sortir la région des Grands Lacs de l’impasse. Une conférence inédite, née d’un constat amer : malgré les accords signés, les combats continuent de déchirer l’est de la République démocratique du Congo.

L’initiative française, portée personnellement par le président Emmanuel Macron, dépasse le seul cadre de la crise congolaise. Elle englobe l’ensemble de la région des Grands Lacs, avec une ambition triple : mobiliser l’aide humanitaire, stimuler les investissements et raviver le dialogue politique. « Un format élargi pour une crise régionale », résume un diplomate français.

Le pari est audacieux. Alors que les processus de Washington (27 juin) et de Doha (14 octobre) peinent à produire des résultats concrets, Paris assure ne vouloir ni les concurrencer ni les remplacer. Bien au contraire : la présence attendue de Massad Boulos pour les États-Unis, de Mohamed Bin Mubarak Al-Khulaifi pour le Qatar et de Tètè Antonio pour l’Angola témoigne d’une volonté de synergie.

La conférence s’articulera autour de trois temps forts. Le segment humanitaire, d’abord, crucial alors que les financements internationaux s’amoindrissent dramatiquement. Le volet économique, ensuite, au Palais de Chaillot, où il sera question d’intégration régionale et d’investissements structurants. Enfin, le cœur diplomatique : un dîner au Quai d’Orsay visant à reconstruire la confiance entre acteurs régionaux.

La présence possible du président congolais Félix Tshisekedi, qui s’est récemment entretenu avec Emmanuel Macron, donnerait à cette rencontre un relief particulier. Signe que Kinshasa, malgré ses réticences passées, pourrait adhérer à cette nouvelle initiative.

Les débats finaux se tiendront à huis clos, gage de sincérité selon les organisateurs. « Éviter l’effet tribune » pour privilégier le dialogue franc : tel est le credo de cette conférence qui, dans l’ombre des chancelleries, tente d’allumer une lumière au bout du tunnel des Grands Lacs.

Kibati sous le feu : nouvelle attaque et psychose au Nord‑Kivu

WALIKALE – Aux premières lueurs de l’aube, les détonations ont brisé le silence. Ce mardi 28 octobre, vers 4 heures du matin, la localité de Kibati, dans le groupement Luberike, est redevenue un enfer. Pour la cinquième fois depuis avril, les wazalendo – combattants d’autodéfense – ont lancé une offensive d’envergure pour déloger les rebelles de l’AFC/M23 de leurs positions.

Une bataille qui s’enlise

Le scénario est devenu tragiquement familier pour les habitants de cette zone du territoire de Walikale, au Nord-Kivu. Le crépitement des armes légères et le tonnerre des armes lourdes ont plongé Kibati et ses environs dans la psychose. Les familles se terrent, coincées entre les lignes de front.

Les wazalendo, venus de l’axe Miba-Mungazi, ont mené des attaques simultanées pour reprendre le contrôle de cette localité stratégique, occupée par les rebelles depuis six mois. Une bataille d’usure qui semble ne jamais finir.

Récemment, les miliciens pro-gouvernementaux avaient repris brièvement une partie de Kibati avant de devoir se retirer. La localité est donc retombée aux mains des insurgés. Mais cet échec n’a pas découragé les wazalendo, déterminés à chasser l’AFC/M23 de ses bastions.

Deux récits, une guerre

Dans cette guerre où les communiqués accompagnent les combats, la version des rebelles diffère. L’AFC/M23 dénonce une « offensive généralisée » lancée dès 3 heures par « la coalition criminelle de Kinshasa », avec artillerie lourde et drones visant délibérément des zones densément peuplées.

Le mouvement affirme exercer son « droit de légitime défense » face à ce qu’il appelle une « violation terroriste du cessez-le-feu ». Ces accusations contrastent avec le récit des sources locales, qui présentent les wazalendo comme des acteurs d’une simple opération de reconquête.

Alors que la communauté internationale appelle au dialogue, Kibati continue de brûler. Chaque tentative de reprise s’accompagne de victimes civiles et de déplacés, dans un conflit où la propagande devient une arme aussi redoutable que les kalachnikovs.

La grande marche de Kinshasa vers l’économie verte

KINSHASA – Ils sont venus des ministères, des ONG, des communautés locales. Du 27 au 30 octobre, la capitale congolaise vibre au rythme d’une première : la Semaine nationale du climat. Objectif affiché : faire de l’environnement l’âme du développement congolais. Dans un pays qui abrite la deuxième forêt tropicale au monde et d’immenses tourbières, l’initiative sonne comme un virage stratégique.

« Un choc d’idées à travers le dialogue », résume Benjamin Toirambe, secrétaire général à l’Environnement. Derrière les mots, un enjeu crucial : mobiliser les financements climatiques internationaux. La RDC, poumon vert de l’Afrique, entend désormais monnoyer son capital naturel au service de son développement.

LIRE AUSSI : https://www.journaldekinshasa.com/cop30-la-rdc-consulte-sa-nation-pour-forger-une-position-commune/

La ministre de l’Environnement, Marie Nyange, voit plus loin encore. Pour elle, ce forum doit forger une unité de langage avant la COP30 au Brésil. « Amener les Congolais à parler d’une seule voix », insiste-t-elle, déterminée à ce que les défis et réalités du bassin du Congo pèsent dans les négociations internationales.

Dans le viseur des organisateurs : une économie verte et inclusive, où chaque emploi contribuerait à protéger l’environnement. Une vision ambitieuse portée jusqu’au sommet de l’État. Le président Félix Tshisekedi en a fait un pacte d’action national, appelant les bailleurs à investir massivement dans l’écodéveloppement, la création d’emplois et le renforcement des compétences.

« Forêt, biodiversité, tourbières et mobilisation des financements climatiques » : le thème de ces assises résume à lui seul le paradoxe congolais. Comment transformer une richesse écologique exceptionnelle en levier de développement durable ? Pendant quatre jours, Kinshasa tente d’écrire la première page d’une nouvelle histoire – celle où la protection du patrimoine naturel ne rimerait plus avec pauvreté, mais avec prospérité partagée.

Mali : l’ombre de la prison tombe sur Moussa Mara

BAMAKO – Il est entré impassible, il ressort condamné. Moussa Mara, ancien Premier ministre du Mali, a été frappé ce lundi 27 octobre par la justice de son pays. Deux ans de prison, dont un an ferme, pour avoir osé sur les réseaux sociaux une déclaration de solidarité envers les « détenus d’opinion ».

Le Pôle national de lutte contre la cybercriminalité de Bamako a rendu son verdict après des semaines de suspens. Les juges n’ont que partiellement suivi les réquisitions du parquet, mais la sanction reste lourde pour celui qui dirigea le gouvernement malien de 2014 à 2015.

Tout est parti d’une publication datée du 4 juillet. « Solidarité indéfectible avec les détenus d’opinion », avait écrit l’ancien chef de gouvernement, ajoutant : « Aussi longtemps que dure la nuit, le soleil finira évidemment par apparaître ! » Des mots poétiques, mais perçus comme subversifs par les autorités en place.

Arrêté le 1er août et placé en détention préventive, Moussa Mara a vu son procès s’ouvrir fin septembre dans une atmosphère tendue. Son avocat, Me Mountaga Tall, avait alors plaidé la modération, invoquant « la sagesse de la cour ». En vain.

À l’annonce du verdict, le principal concerné est resté de marbre. « Serein », selon son défenseur, qui a immédiatement annoncé le dépôt d’un appel. Le combat judiciaire continue donc, mais l’heure est désormais à la prison pour l’ancien Premier ministre.

Cette condamnation intervient dans un contexte politique malien particulièrement sensible, où la liberté d’expression semble se contracter comme peau de chagrin. Le message de Moussa Mara, perçu comme une métaphore de l’espoir démocratique, lui vaut aujourd’hui de partager le sort de ceux qu’il défendait.

Le soleil se lèvera-t-il un jour sur une justice apaisée ? Pour l’ancien Premier ministre, la nuit institutionnelle vient de tomber, plus épaisse que jamais.

Paul Biya, l’éternel retour : le Cameroun prolonge l’histoire d’un règne sans fin

YAOUNDÉ, 27 octobre 2025 — La scène politique camerounaise rejoue une partition bien connue. À 92 ans, Paul Biya vient d’être réélu pour un huitième mandat, avec 53,66 % des suffrages, selon les résultats officiels proclamés lundi par le Conseil constitutionnel. Au pouvoir depuis 1982, le chef de l’État perpétue un règne aussi long qu’inébranlable, malgré les contestations et l’usure du temps.

Son principal adversaire, Issa Tchiroma Bakary, refuse la défaite. Selon ses propres chiffres, il aurait remporté l’élection avec 54,8 % des voix. Dès la veille de la proclamation, il appelait à des manifestations pacifiques à Douala, Yaoundé et Garoua pour dénoncer une « confiscation du vote populaire ».

Quelques heures après la validation du scrutin, l’opposant déclare depuis son domicile à Garoua : « L’assaut est lancé », en évoquant des tirs sur des civils rassemblés devant sa résidence. La tension est palpable. Le gouvernement, par la voix du ministre de l’Administration territoriale Paul Atanga Nji, dénonce un « plan de déstabilisation » et met en garde contre la diffusion de faux résultats électoraux. Plusieurs arrestations ont déjà eu lieu à Garoua et Yaoundé.

Une victoire sans suspense, un pays sans alternance

Depuis des décennies, chaque élection camerounaise ressemble à une répétition générale. Les résultats sont prévisibles, les recours balayés, les contestations vite réprimées. La Cour constitutionnelle, présidée par Clément Atangana, entérine sans surprise le verdict des urnes, malgré les accusations de fraude, les bulletins préremplis et les bureaux fictifs.

Issa Tchiroma, lui, rejoint la longue liste des opposants tolérés pour la forme : Maurice Kamto, Cabral Libii, tous battus avant même de concourir. Le Cameroun semble avoir transformé la démocratie en rituel immobile, où l’alternance n’est plus une perspective, mais un mythe.

Une démocratie fatiguée, un symbole régional

En Afrique francophone, Paul Biya n’est pas une anomalie : il est un modèle. Du Togo au Congo-Brazzaville, de la Côte d’Ivoire au Tchad, les présidents se succèdent… à eux-mêmes. Les cours constitutionnelles ne jugent plus, elles valident. Le peuple vote, mais les institutions décident.

Le Cameroun de 2025 illustre cette mécanique bien huilée : un pays figé, une jeunesse désabusée, et un pouvoir devenu son propre monument.
Et pendant que le monde observe sans surprise la réélection du « sphinx d’Étoudi », une question flotte, presque ironique :
le temps, lui, osera-t-il un jour battre Paul Biya ?