Boji, l’héritier de Kamerhe à l’Assemblée

Le jeu des chaises musicales au sommet de l’État congolais connaît un nouvel acte. Aimé Boji Sangara, ancien ministre de l’Industrie et fidèle parmi les fidèles du président Félix Tshisekedi, s’apprête à prendre les rênes de l’Assemblée nationale. Sa désignation comme candidat unique par la majorité présidentielle scelle une transition orchestrée depuis le palais de la Nation.

La manœuvre, minutieusement préparée, a contraint l’ancien ministre à démissionner du gouvernement pour retrouver son siège de député de Walungu, condition indispensable pour briguer la présidence de la chambre basse. Un sacrifice calculé qui lui ouvre désormais la voie vers le perchoir.

Kamerhe, le départ en douceur

Vital Kamerhe, l’actuel président de l’Assemblée, a pris acte de cette passation de pouvoir. Dans un communiqué officiel, le chef de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC) a rappelé que cette décision émanait du présidium de l’Union sacrée de la Nation, sous l’arbitrage de la « Haute Autorité de référence » – une formule désignant clairement le président Tshisekedi.

« Resserrons les rangs », a lancé Kamerhe à ses troupes, appelant à rester mobilisés autour des « idéaux de paix et de reconstruction nationale ». Un discours de sortie qui évite soigneusement toute amertume, preuve que le sort de son successeur était scellé depuis longtemps dans les arcanes du pouvoir.

La préservation des équilibres

Ce remplacement n’est pas anodin. En choisissant Boji, originaire comme Kamerhe du Sud-Kivu, la majorité présidentielle maintient un équilibre régional crucial. Le message est clair : le bassin politique du Sud-Kivu conserve son influence au plus haut niveau de l’État, une manière d’éviter les frustrations dans cette région stratégique.

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Pourtant, la désignation n’a pas fait l’unanimité. Dans les couloirs du Palais du Peuple, plusieurs députés dénoncent une procédure manquant de transparence. « Tout s’est décidé en petit comité, sans véritable consultation », confie un élu sous couvert d’anonymat.

L’élection, prévue dans les prochains jours, ne semble pourtant laisser place à aucun suspense. Boji devrait hériter sans encombre du perchoir, tandis que la session budgétaire en cours patine, paralysée par ces recompositions politiques.

Ce remaniement parlementaire s’inscrit dans un vaste mouvement de consolidation du pouvoir présidentiel. En plaçant un homme de confiance à la tête de l’Assemblée, Tshisekedi s’assure le contrôle absolu de la machine législative. Le nouveau président de la chambre basse aura pour mission de traduire en lois la vision du chef de l’État, dans un pays où l’exécutif et le législatif marchent désormais en parfaite symbiose.

Grands Lacs : l’Allemagne et la Belgique ouvrent leur bourse

Dans le cadre feutré du Centre de conférences ministériel à Paris, les annonces se sont succédé comme autant de bouées lancées à une région en détresse. Jeudi, l’Allemagne a promis 53,5 millions d’euros d’aide humanitaire pour les Grands Lacs, tandis que la Belgique engageait plus de 51 millions sur deux ans. Des montants substantiels qui soulignent l’urgence d’une crise qualifiée par Berlin de « l’une des plus graves au monde ».

Le représentant allemand a fixé le cadre : cet argent doit couvrir la période 2025-2027 et s’accompagne d’une exigence claire : garantir un accès humanitaire sécurisé et trouver des solutions durables. « La communauté internationale ne peut rester sourde aux cris des millions de déplacés de l’est de la RDC », a-t-il martelé.

La Belgique, partenaire historique

À ses côtés, la Belgique a réaffirmé son attachement indéfectible au droit international humanitaire. Bruxelles débloque 26,6 millions d’euros pour 2025 et 24,6 millions pour 2026. Une contribution qui s’inscrit dans la continuité historique des relations privilégiées entre l’ancienne puissance coloniale et la région des Grands Lacs.

Le diplomate belge a insisté sur deux priorités : la protection des civils et le renforcement des médiations. « L’aide d’urgence reste essentielle, mais elle ne suffira pas sans une solution politique », a-t-il prévenu, appelant à « créer les conditions d’un retrait des groupes armés ».

Une mobilisation internationale inédite

Ces annonces s’inscrivent dans un effort collectif plus large. Le président français Emmanuel Macron a clôturé la conférence en annonçant une mobilisation internationale dépassant les 1,5 milliard d’euros. Une somme colossale qui témoigne de la prise de conscience face à l’ampleur de la catastrophe humanitaire.

Cette conférence, qui réunissait une cinquantaine de pays et d’organisations, marque un tournant dans l’approche de la crise des Grands Lacs. Elle aura permis de conjuguer urgence humanitaire et vision à long terme, mêlant aide immédiate et soutien aux processus de paix.

Reste maintenant le plus difficile : transformer ces engagements en actions concrètes. Les humanitaires sur le terrain attendent ces fonds comme une bouffée d’oxygène, tandis que les diplomates espèrent que cette mobilisation financière créera un momentum politique décisif. La route sera longue, mais Paris, Berlin et Bruxelles viennent d’envoyer un signal fort : les Grands Lacs ne sombreront pas dans l’indifférence.

Goma : La piste humanitaire qui divise les Grands Lacs

La piste d’atterrissage de l’aéroport de Goma est devenue, soudainement, la nouvelle ligne de front diplomatique des Grands Lacs. Depuis Paris, le jeudi 30 octobre, Emmanuel Macron a annoncé sa réouverture prochaine aux vols humanitaires, provoquant aussitôt un tollé du Rwanda et du mouvement rebelle M23.

Derrière cette décision en apparence technique, se joue en réalité un bras de fer géopolitique où chaque mot compte. Le président français, s’exprimant lors de la conférence de soutien à la paix et à la prospérité dans la région des Grands Lacs, a déclaré :
« L’aéroport rouvrira dans les prochaines semaines pour des corridors humanitaires, dans le strict respect de la souveraineté congolaise. »

Cette annonce vise avant tout à désenclaver l’Est de la République démocratique du Congo, asphyxié par près d’un an de combats acharnés entre l’armée congolaise et la rébellion du M23.

Kigali oppose un veto diplomatique

Le Rwanda riposte dans l’heure. Son ministre des Affaires étrangères, Olivier Nduhungirehe, conteste violemment la légitimité de Paris : « L’aéroport se trouve sous le contrôle des autorités de fait, le M23. Une telle décision relève des négociations de Doha, pas d’une conférence parisienne. » Un rejet catégorique qui sonne comme un désaveu pour la diplomatie française.

Dans le camp rebelle, Corneille Nangaa, coordinateur politique du M23, enfonce le clou : « Cette annonce inopportune ignore totalement la réalité du terrain. Comment parler de réouverture quand les bombardements de Kinshasa détruisent ponts et aérodromes ? » L’ancien président de la CENI congolaise accuse même les « lobbys humanitaires » de « profiter de la détresse des populations ».

Kinshasa célèbre une victoire souveraine

Le gouvernement congolais, lui, savoure une revanche diplomatique. Patrick Muyaya, porte-parole du gouvernement, tonne : « Ni l’agitation du père Rwanda ni celle du fils M23 n’entraveront cette avancée humanitaire. Vouloir marchander l’aide aux déplacés révèle le cynisme de nos agresseurs. »

Les mots choisis trahissent l’amertume accumulée : le « père » et le « fils » dessinent une filiation jugée indécente entre Kigali et la rébellion. Le message est clair : Kinshasa considère cette réouverture comme un acte de souveraineté retrouvée.

Derrière cette batille sémantique, l’urgence humanitaire persiste. Des millions de déplacés attendent médicaments et nourriture. La France espère que ces vols humanitaires soulageront des vies, mais la réaction violente du Rwanda et du M23 prouve qu’à Goma, chaque piste d’atterrissage reste un enjeu de pouvoir. La région des Grands Lacs retient son souffle, suspendue au premier atterrissage.

Tshisekedi à Paris : un énième plaidoyer pour la paix à l’Est du Congo

La voix porte, ferme et déterminée, dans le Centre de Conférence ministériel parisien. Félix Tshisekedi, président de la République démocratique du Congo, adresse ce jeudi un message sans détour à la communauté internationale. Face aux diplomates du monde entier, il dresse un constat accablant : le Rwanda et son soutien au groupe M23 alimentent directement la crise humanitaire qui ravage l’Est congolais.

« La crise humanitaire dans mon pays découle directement des actions militaires que mène le groupe armé AFC/M23. Et le Rwanda soutient ce groupe sur les plans logistique, financier et opérationnel. » Les mots du chef de l’État congolais frappent l’assistance. Plus qu’un discours, c’est un réquisitoire.

Trente ans d’une crise qui n’en finit pas

Le président congolais replace la crise actuelle dans une temporalité douloureuse. « L’Est de la RDC saigne depuis trente ans d’une plaie qui ne se referme pas. Nous ne vivons pas une simple crise, mais une tragédie permanente. » Cette déclaration sonne comme un aveu d’échec pour la diplomatie internationale.

Dans la salle, les représentants d’une vingtaine de nations écoutent, attentifs. Les États-Unis ont envoyé Massad Boulos, conseiller présidentiel pour les affaires arabes et africaines. La France participe avec son ministre Jean-Noël Barrot. Même le Rwanda écoute, par la voix de son ministre des Affaires étrangères.

Trois demandes cruciales

Tshisekedi structure son intervention autour de trois exigences précises. Première urgence : l’accès humanitaire. « Nous réclamons des corridors humanitaires sécurisés pour apporter des soins, de la nourriture et des abris aux populations prisonnières des combats. »

Deuxième priorité : le financement. « J’exige des engagements financiers supplémentaires, ciblés et durables. Ces fonds doivent couvrir les besoins vitaux. Ne voyez pas cela comme une simple aide, mais comme un investissement pour stabiliser une région stratégique. »

Enfin, troisième point, le plus politique : l’alignement diplomatique. « Chaque partenaire présent doit soutenir l’application de la Résolution 2773 du Conseil de sécurité. Tous doivent exiger le retrait immédiat du M23. Une paix durable exige d’abord la fin de l’occupation. Sur ce principe, je ne tolérerai aucun double langage. »

L’heure des comptes

Les organisateurs de la conférence rappellent l’ampleur des besoins. Le plan humanitaire 2025 pour la RDC nécessite 2,54 milliards de dollars. Or, les donateurs n’ont financé que 16% de ce montant. « Le succès de cette conférence se mesurera à l’ampleur de la mobilisation financière », avait prévenu Jérémy Robert, conseiller Afrique d’Emmanuel Macron.

Plus tôt dans la journée, le ministre togolais des Affaires étrangères Robert Dussey avait insisté : « Cette crise révèle notre échec collectif. L’action humanitaire ne relève pas de la charité, mais de la solidarité essentielle. »

Les annonces de financement arriveront dans l’après-midi. Mais Tshisekedi le sait : sans pression réelle sur Kigali, l’aide humanitaire ne sera qu’un soulagement temporaire. La communauté internationale doit maintenant choisir : accompagner verbalement la RDC ou contraindre réellement le Rwanda à cesser son ingérence. Le compte à rebours pour l’Est congolais a commencé.

Braquage RawBank : la justice ordonne une reconstitution sur les lieux du crime

Le tribunal militaire de Kinshasa/Gombe a décidé de revivre le braquage. Ce jeudi, les juges ont ordonné une descente directement dans l’agence RawBank de la place Victoire, épicentre du casse survenu le 16 octobre dernier. Une décision rare qui marque un tournant dans cette affaire aux multiples zones d’ombre.

Le major Freddy Ewume, président de la juridiction, a fixé la reconstitution au mardi 4 novembre. Objectif : dénouer le jeu des versions contradictoires en replaçant chacun dans le décor exact du braquage. « Cette descente permettra au Tribunal de mieux comprendre le déroulement des faits », a-t-il justifié, conscient que la matérialité des lieux pourrait trancher là où les témoignages divergent.

La défense joue la carte de l’irresponsabilité psychiatrique

L’audience a également vu la défense d’Honorine Porsche déployer une nouvelle stratégie. Ses avocats ont exigé la comparution des psychiatres ayant diagnostiqué chez leur cliente des « troubles mentaux notoires », dont une dépression sévère. Pour eux, ce rapport médical constitue une cause de non-imputabilité qui devrait laver l’accusée de toute responsabilité pénale.

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La juridiction militaire, prudente, a pris acte de cette requête sans s’engager immédiatement. Elle se réserve quelques jours pour statuer sur l’opportunité de faire comparaître ces experts dont le témoignage pourrait bouleverser toute la procédure.

Le témoignage poignant de la caissière

La guichetière Bénédicte Tshiyoba Kabangu a livré un témoignage glaçant. Face aux juges, elle a décrit les minutes terrifiantes du braquage. « C’est par peur que je lui ai remis l’argent, j’avais vu la mort devant moi », a-t-elle confié, la voix empreinte d’émotion. Elle se souvient parfaitement de la menace : « Tu veux mourir ? Sinon donne l’argent ».

Dans un récit précis, elle a détaillé le contenu du sac : 10 500 dollars américains et 28 millions de francs congolais en petites coupures. Un butin substantiel prélevé sous la menace d’une arme factice, selon l’accusée. « C’était la première fois que je voyais cette dame », a-t-elle insisté, précisant que l’agresseuse portait une cagoule durant l’incident.

Ce procès aux multiples rebondissements captive l’opinion publique congolaise. Entre la reconstitution in situ et la possible irresponsabilité pénale, la justice militaire explore toutes les pistes. L’affaire RawBank, déjà marquée par le profil atypique de l’accusée principale, s’annonce plus complexe que jamais. Rendez-vous est pris mardi prochain dans l’agence bancaire, où juges, accusés et témoins rejoueront le drame minute par minute.

Dahlia, 4 ans : le père reçu par le ministre de la Justice

Ce jeudi 30 octobre 2025, une rencontre chargée d’émotion a eu lieu au Palais de la Justice. Le Ministre d’État, Guillaume Ngefa Atondoko Andal, a personnellement reçu Andy Baswe Tshikwakwa. Ce père endeuillé cherche la justice pour sa fille Dahlia, tragiquement emportée à l’âge de quatre ans par l’effondrement d’un mur du Cercle Hippique de Kinshasa.

Une famille brisée par le drame

Durant cette audience, Andy Baswe a partagé l’immense douleur qui frappe sa famille. Il a révélé une terrible cascade de malheurs. Le grand-père de Dahlia n’a pas supporté la perte de sa petite-fille. Il est décédé peu de temps après elle, victime du même choc. La famille Baswe affronte donc un double deuil, un traumatisme qui a profondément ému le Ministre d’État.

Celui-ci a présenté ses condoléilles personnelles et son soutien indéfectible. Il a assuré la famille de son engagement total. « Cette situation m’a beaucoup touché », a-t-il confié, réaffirmant son attention constante pour les droits des citoyens, surtout lorsqu’il s’agit de protéger les enfants.

La quête de vérité et de responsabilités

Le père de Dahlia a exposé les circonstances du drame. Il a pointé du doigt les travaux réalisés par la société Modern Construction, propriété de l’homme d’affaires Harish Jagtani. Selon ses déclarations, c’est la malfaçon de ce mur en construction qui a causé l’effondrement fatal.

Le Ministre de la Justice a garanti que les instances compétentes traitaient désormais le dossier. L’objectif est double : respecter scrupuleusement les lois de la République et obtenir une réparation juste pour les préjudices subis. Le gouvernement suit ce dossier de très près, comme tous ceux qui touchent à la vie et à la dignité des Congolais.

Cette audience marque une étape cruciale pour la famille Baswe. La famille aurait dû fêter les cinq ans de Dahlia le 8 septembre dernier. Désormais, elle se bat pour que la lumière soit faite et que la mémoire de la petite fille soit honorée par une justice rendue.

l’Assemblée nationale valide six nouveaux visages

C’est un changement de garde discret qui s’est opéré, ce jeudi, sous le dôme de l’Assemblée nationale. La plénière a acté le remplacement de six députés, emportés par les verdicts de la justice, les arcanes du pouvoir ou la fatalité du destin. Une séance administrative qui dessine, en creux, les soubresauts de la vie politique congolaise.

La transition la plus symbolique concerne l’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo Mapon. L’arrêt définitif de la Cour constitutionnelle, tombé le 20 mai et notifié à l’Assemblée le 10 juin, a scellé son sort : condamnation et interdiction de toute fonction publique. Son premier suppléant, Ibrahim Assani Émile, hérite mécaniquement du siège. Un héritage que l’intéressé semble accueillir avec une certaine distance, lui qui n’a pas daigné se présenter devant la Commission politique, administrative et juridique (PAJ) pour les formalités d’usage. L’institution, pragmatique, a jugé que les données de la CENI suffisaient à valider son mandat.

Ce remaniement parlementaire ne se limite pas à cette seule affaire. Le rapport de la Commission PAJ a dévoilé un véritable jeu de chaises musicales, reflétant les réalités du pouvoir. Le gouvernement Suminwa II, en puisant dans le vivier des élus, a créé des vacances que des suppléants s’empressent de combler. Randall Muzito succède ainsi à Adolphe Muzito, nommé Vice-Premier ministre. Papy Kitenge prend la place d’Éliezer Ntambwe, promu ministre délégué. Cyrille Kotongo hérite du siège de Jean-Bosco Kotongo, devenu gouverneur du Nord-Ubangi. Enfin, Behn Mulolo remplace John Banza, propulsé ministre des Infrastructures.

Dans ce ballet des ambitions et des carrières, une note tragique résonne.

 Le sixième remplacement acte l’absence définitive de Sophie Kakudji, l’élue de Kabalo, tragiquement disparue dans l’incendie de sa résidence à Lubumbashi au mois d’août dernier. C’est Éric Ngoyi qui prendra sa suite, dans un hémicycle où son souvenir plane.

Pour ces six nouveaux entrants, le calendrier est désormais limpide. Un délai de huit jours leur est imparti pour faire un choix crucial : siége ou portefeuille ? Ils doivent se prononcer sur le maintien de leur mandat, au regard des fonctions incompatibles qu’ils pourraient exercer. Passé ce délai, le silence vaudra renoncement. La séance est levée, le compte à rebours est lancé.

Crise des Grands Lacs : le casting inédit de la diplomatie française

Ils sont venus à Paris, portant le poids d’une crise et l’espoir ténu d’une médiation. Autour de la table, ce jeudi, le président congolais Félix Tshisekedi, dont le pays saigne dans l’indifférence relative, écoute. Face à lui, le président togolais Faure Gnassingbé, en sage mandaté par l’Union africaine, et l’influent ministre qatari Mohammed bin Abdulaziz Al-Khulaifi, négociateur des dossiers impossibles. Les États-Unis et l’Union européenne, représentés par Massad Boulos et Kaja Kallas, complètent ce casting diplomatique réuni à l’initiative de l’Élysée.

Mais dans le théâtre feutré de la diplomatie internationale, les silences en disent souvent plus long que les discours. Et à Paris, les absents résonnent avec une force particulière. Les fauteuils vides des présidents Paul Kagame du Rwanda, Évariste Ndayishimiye du Burundi et Yoweri Museveni de l’Ouganda dessinent les contours de l’impasse. Leur boycott, poli mais ferme, rappelle une évidence cruelle : on ne peut imposer la paix à des belligérants qui refusent de s’asseoir ensemble.

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La France tente pourtant de jouer les facilitateurs. En conviant les soutiens continentaux et les bailleurs internationaux, elle espère créer un momentum, une dynamique suffisante pour faire plier les récalcitrants. Les attentes sont colossales : débloquer une aide humanitaire d’urgence, imaginer des perspectives économiques et, surtout, réinjecter une once de confiance dans un dialogue régional au point mort.

Paris lance un pari audacieux sur l’échiquier des Grands Lacs. Mais la première règle de la diplomatie est de réunir toutes les parties autour de la table. Aujourd’hui, en réussissant à rassembler les médiateurs mais en échouant à convaincre les principaux protagonistes, l’Élysée donne à voir les limites de son influence. La conférence de Paris pourrait bien n’être qu’une répétition générale, en attendant que les véritables stars daignent enfin monter sur scène.

Crise des Grands Lacs : l’ultime appel de Paris

PARIS — Ce jeudi 30 octobre, les lumières de la diplomatie mondiale se braquent sur la capitale française. Dans le silence feutré des salons officiels, une cinquantaine de nations s’apprêtent à ausculter une crise qui ne fait plus la une, mais qui continue de broyer des vies. Au cœur des débats : l’urgence humanitaire dans la région des Grands Lacs, un dossier où la générosité internationale s’épuise, tandis que les besoins, eux, explosent.

Sous le double patronage de la France et du Togo, cette conférence se veut un électrochoc. Un ultime sursaut pour « resensibiliser » des bailleurs en proie à ce que les diplomates appellent, avec une froide pudeur, la « fatigue ». La fermeture des programmes de l’USAID en RDC n’est que la partie émergée d’un iceberg de désengagement.

L’heure du constat amer

« Les efforts de financement sont en baisse », constate, sans fard, Rémy Maréchaux, ambassadeur de France en RDC. Sa voix porte l’urgence des terrains oubliés. Pour lui, la bataille se gagne d’abord par les mots : il faut « réexpliquer » l’indicible. C’est la mission dévolue aux humanitaires et aux représentants de la société civile congolaise invités à cette table ronde : donner un visage et un nom à des statistiques qui ne font plus frémir.

Au-delà de l’argent, l’accès

La seconde partie des assises s’annonce plus ardue encore. Il ne s’agira plus seulement de comptes, mais de principes : le respect du droit international humanitaire. Comment acheminer l’aide quand les routes sont coupées, les humanitaires menacés, les zones de conflit inaccessibles ?

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« Ce qui est important, c’est que les acteurs humanitaires puissent travailler librement », insiste l’ambassadeur. Son plaidoyer trace une ligne rouge : sans accès garanti, sans entraves levées, les fonds les plus colossaux resteront lettre morte.

Paris tente donc un pari : ranimer la flamme d’une solidarité à bout de souffle. Dans les coulisses, on espère que cette « autopsie » ne se transformera pas en oraison funèbre de l’aide internationale, mais en son sursaut salvateur. Le temps n’est plus aux discours, mais à l’action. Les millions de déplacés de l’Est congolais, et au-delà, attendent que les mots prononcés sous les ors de Paris se transforment enfin en pain et en médicaments.

Procès Sarah Ebabi : un an de prison avec sursis pour violation des consignes militaires

KINSHASA – Le tribunal militaire de garnison de Kinshasa-Gombe a rendu, ce mercredi 29 octobre 2025, son verdict dans l’affaire opposant le parquet militaire à l’adjudante Sarah Ebabi Bongoma Koli, jugée pour violation des consignes militaires interdisant la publication sur les réseaux sociaux des effets militaires.

L’adjudante, en service aux renseignements militaires, a été condamnée à 12 mois de servitude pénale principale avec sursis de 12 mois, ce qui signifie qu’elle ne purgera pas de peine de prison, à condition de respecter la loi pendant cette période.

Les faits remontent au 19 octobre 2025, lorsque Sarah Ebabi s’est rendue dans un studio photo situé sur le boulevard Sendwe, à Matonge (Kalamu), pour une séance photo privée avec son fiancé, en préparation de leur mariage. Les images montrent la militaire en tenue, arborant son grade et posant de manière intime avec son futur époux. Quelques jours plus tard, ces photos ont circulé sur les réseaux sociaux, provoquant un véritable débat public sur le respect des consignes militaires et l’image des Forces armées de la RDC.

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Le ministère public, représenté par le sous-lieutenant magistrat Ghislain Lisalama, avait requis 10 ans de servitude pénale en perpétuité, estimant que le comportement de l’adjudante portait atteinte à l’honneur et à l’image de l’armée.

À la barre, Sarah Ebabi a reconnu avoir organisé la séance photo, mais a nié toute intention de publication des images sur les réseaux sociaux. Elle a rappelé son engagement de dix ans au service de l’armée et affirmé qu’elle n’avait jamais voulu ternir son institution.

Cette affaire, largement commentée sur les réseaux sociaux, illustre la tension entre vie privée des militaires et respect des consignes hiérarchiques, et marque un précédent dans l’application de la discipline au sein des Forces armées de la RDC.