Kinshasa, ce mardi 18 novembre. La voix est grave, le ton sans appel. Martin Fayulu, figure inflexible de l’opposition congolaise, s’est adressé à la nation comme on lance un cri d’alarme. Dans un message solennel, le président de la coalition LAMUKA a dressé un réquisitoire cinglant contre la diplomatie du gouvernement, qu’il juge complice du dépeçage programmé de la République Démocratique du Congo.
Face caméra, l’homme semble incarner à lui seul la conscience troublée d’un pays qui se sent trahi. Les récents accords conclus à Washington et Doha ? Pour lui, ce ne sont que des « actes d’abdication » signés dans l’urgence, loin du sol congolais et de sa réalité sanglante.
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« Comment pactiser avec ses bourreaux ? »
La question, lancinante, traverse tout son discours. « Comment peut-on parler de coopération lorsque les forces rwandaises et ougandaise occupent nos terres, exploitent nos ressources et provoquent les déplacement, la mort et la souffrance de nos concitoyens ? » interroge-t-il, chaque mot pesant comme une accusation.
Pour Fayulu, l’intégration régionale n’est qu’un leurre. Un concept vide de sens quand, dit-il, « la souveraineté et l’intégrité territoriale de la RDC sont bafouées ». Sa logique est implacable : on ne construit pas l’avenir avec ceux qui vous poignardent dans le présent.
L’accord de Doha, un « pacte avec le diable »
L’opposant voue aux gémonies l’accord-cadre signé à Doha le week-end dernier avec le M23. Ce texte, estime-t-il, « ne saurait constituer la base d’un accord de paix durable ». Il y voit au contraire le germe d’une capitulation, un document qui « mettrait en péril l’avenir de nos enfants ».
Sa colère est méthodique : pourquoi avoir ignoré la résolution 2773 du Conseil de sécurité de l’ONU ? Pourquoi avoir contourné les véritables enjeux – le cessez-le-feu, le retrait des troupes – pour s’engager dans ce qu’il qualifie de marchandage indigne ?
L’ultimatum à Tshisekedi
Le message se fait plus pressant, presque prophétique. S’adressant directement au président Félix Tshisekedi, Fayulu lance : « Je vous invite à convoquer sans délai le dialogue national, sinon l’histoire vous tiendra responsable de la balkanisation du Congo. »
La menace est historique, lourde de sens. En associant dans une même condamnation le président rwandais Paul Kagame et l’ancien chef de l’État Joseph Kabila, Fayulu dessine les contours d’une trahison qui, à ses yeux, dépasse les clivages politiques habituels.
L’appel au sursaut
Face à ce qu’il perçoit comme un naufrage programmé, l’opposant ne se contente pas de dénoncer. Il appelle le peuple congolais à se lever, à protéger « ce qui reste de la République Démocratique du Congo, valeur sacrée de son histoire et de son intégrité territoriale ».
Les mots sont choisis, lourds de symbolique : « nation », « dignité », « honneur ». Autant de concepts qu’il brandit comme des boucliers contre ce qu’il considère comme la grande braderie de la souveraineté congolaise.
Alors que Kinshasa bruisse de rumeurs et que l’Est du pays continue de brûler, la voix de Fayulu résonne comme celle d’un Cassandre. Son discours, tout en nuances absentes et en certitudes tranchantes, dessine les lignes de fracture d’un pays au bord de l’implosion. L’histoire, effectivement, jugera. Mais d’ici là, le Congo retient son souffle.
