Paul Biya, l’éternel retour : le Cameroun prolonge l’histoire d’un règne sans fin

YAOUNDÉ, 27 octobre 2025 — La scène politique camerounaise rejoue une partition bien connue. À 92 ans, Paul Biya vient…

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YAOUNDÉ, 27 octobre 2025 — La scène politique camerounaise rejoue une partition bien connue. À 92 ans, Paul Biya vient d’être réélu pour un huitième mandat, avec 53,66 % des suffrages, selon les résultats officiels proclamés lundi par le Conseil constitutionnel. Au pouvoir depuis 1982, le chef de l’État perpétue un règne aussi long qu’inébranlable, malgré les contestations et l’usure du temps.

Son principal adversaire, Issa Tchiroma Bakary, refuse la défaite. Selon ses propres chiffres, il aurait remporté l’élection avec 54,8 % des voix. Dès la veille de la proclamation, il appelait à des manifestations pacifiques à Douala, Yaoundé et Garoua pour dénoncer une « confiscation du vote populaire ».

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Quelques heures après la validation du scrutin, l’opposant déclare depuis son domicile à Garoua : « L’assaut est lancé », en évoquant des tirs sur des civils rassemblés devant sa résidence. La tension est palpable. Le gouvernement, par la voix du ministre de l’Administration territoriale Paul Atanga Nji, dénonce un « plan de déstabilisation » et met en garde contre la diffusion de faux résultats électoraux. Plusieurs arrestations ont déjà eu lieu à Garoua et Yaoundé.

Une victoire sans suspense, un pays sans alternance

Depuis des décennies, chaque élection camerounaise ressemble à une répétition générale. Les résultats sont prévisibles, les recours balayés, les contestations vite réprimées. La Cour constitutionnelle, présidée par Clément Atangana, entérine sans surprise le verdict des urnes, malgré les accusations de fraude, les bulletins préremplis et les bureaux fictifs.

Issa Tchiroma, lui, rejoint la longue liste des opposants tolérés pour la forme : Maurice Kamto, Cabral Libii, tous battus avant même de concourir. Le Cameroun semble avoir transformé la démocratie en rituel immobile, où l’alternance n’est plus une perspective, mais un mythe.

Une démocratie fatiguée, un symbole régional

En Afrique francophone, Paul Biya n’est pas une anomalie : il est un modèle. Du Togo au Congo-Brazzaville, de la Côte d’Ivoire au Tchad, les présidents se succèdent… à eux-mêmes. Les cours constitutionnelles ne jugent plus, elles valident. Le peuple vote, mais les institutions décident.

Le Cameroun de 2025 illustre cette mécanique bien huilée : un pays figé, une jeunesse désabusée, et un pouvoir devenu son propre monument.
Et pendant que le monde observe sans surprise la réélection du « sphinx d’Étoudi », une question flotte, presque ironique :
le temps, lui, osera-t-il un jour battre Paul Biya ?

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