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Couleur de la peau : les noirs victimes du racisme en occident

Dr. Ahmadou Sehou ,

L’assassinat du noir américain George Floyd par le policier blanc, a suscité une vague d’indignation à travers le monde. Les peuples opprimés (noirs), revendiquent a cet effet, la reconnaissance et le respect de leur dignité.  Très indigné le Dr. Ahmadou Sehou, Enseignant d’histoire à l’université de Maroua (Cameroun), spécialiste de l’esclavage, déplore ce qu’il qualifie du mépris de l’occident envers les noirs. 

 Plusieurs édifices publics, monuments et rues d’Afrique portent les noms des colonisateurs, esclavagistes et personnalités étrangères. Mais depuis l’assassinat du noir américain George Floyd, certaines populations revendiquent que cela change.  Quelle analyse faites-vous ?  

L’assassinat du citoyen américain George Floyd par un policier blanc, a suscité une grosse vague d’indignation à travers le monde et remis au-devant de l’actualité la question du racisme dont sont victimes les Noirs sur tous les continents. Cela montre que les discriminations, les exclusions, les exactions et même les meurtres sur la seule base de la couleur de la peau ont encore cours malgré la fin de l’esclavage. Les Noirs sont particulièrement visés et victimes de ces actes de barbarie inhumains. Cela contraste avec la présence dans les espaces publics africains des monuments, des stèles, des noms de rues des personnages ayant joué un rôle majeur à l’époque de l’esclavage ou celle de la colonisation qui lui a succédé.

Par cette seule présence, on peut dire qu’il reste encore beaucoup à faire pour libérer l’Afrique et les Africains de ces formes pernicieuses de domination, d’exploitation et d’extermination qu’ont été l’esclavage et la colonisation pratiqués sur plusieurs siècles et qui se perpétuent de nos jours sous des formes variés. Leurs traces sont encore visibles et outrageusement célébrées dans nos cités. Ce qui traduit une méconnaissance de notre passé et une insuffisance du travail de mémoire de la part des politiques et des intellectuels africains. Il est inadmissible que des noms des personnages rendus tristement célèbres par les horreurs qu’ils ont commises continuent à être visibles et parfois célébrés dans nos places publiques. Les revendications et protestations actuelles doivent être l’occasion idoine pour revisiter notre passé et y extirper tout ce qui renvoie à ces horreurs et aux acteurs qui les ont rendues possibles.

Qu’est-ce qui explique que les noms des héros nationaux soient en second rang au profit de ceux d’ailleurs dont le passage en Afrique a été caractérisé par des actes de pillage, torture etc. ?  

L’esclavage et la colonisation sont les produits d’une idéologie et d’une conception de l’homme qui ont conduit à une certaine hiérarchisation des races et des couleurs. Pour les peuples qui en ont été les victimes, notamment les Africains, il s’est agi d’un lavage de cerveau, d’une inversion des valeurs, d’un processus radical d’infériorisation par rapport aux autres races, peuples et couleurs! Les Africains qui ont lutté contre la traite, l’esclavage et la colonisation ont été relégué aux oubliettes, leurs combats présentés comme ce qu’il ne fallait ni faire ni suivre! Ils ont été considérés comme des anti-modèles ! A leur place, on a promu la célébration des héros des autres, ceux-là qui ont conquis, combattu les Africains et pillé l’Afrique!

L’histoire enseignée en Afrique ou sur l’Afrique a été jusqu’ici celle de ces pillards dominateurs et conquérants qui ont détruit l’Afrique, ses structures politiques et sociales, ses valeurs culturelles et religieuses. L’esclavage et la colonisation ont laissé leurs vestiges et monuments, comme pour demander aux Africains de continuer à célébrer la barbarie. Les conditions d’accession à l’indépendance en ayant tué le nationalisme et les nationalistes, ont donné libre cours à la perpétuation de cet esprit criminel par l’intermédiaire des collaborateurs des bourreaux d’hier, installés à la tête des Etats pour perpétuer l’exploitation et le pillage des ressources. Pour ces collaborateurs et prédateurs, il n’était pas bien vu de rappeler le souvenir de ceux qui se sont battu pour la liberté et l’indépendance du continent. Ils ont préféré ignorer les héros de l’histoire nationale en continuant à célébrer les dominateurs d’hier et en cultivant la collaboration et la soumission comme des valeurs suprêmes!

C’était l’entretien avec le Dr. Ahmadou Sehou ,Enseignant d’histoire à l’université de Maroua (Cameroun), spécialiste de l’esclavage.

 

 

 



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