RCA : des mercenaires de Wagner accusés de viols sur mineures

Dans deux affaires différentes, des mercenaires russes sont accusés d’avoir violé des mineures Centrafricaines âgées respectivement de 16 et 17 ans, à proximité de Berengo, situé à une soixantaine de kilomètres de Bangui, dans la préfecture de la Lobaye.

Voilà maintenant un peu plus de deux ans que les premiers mercenaires russes de la société Wagner sont arrivés en Centrafrique. Depuis lors, des cas de viols, restés non-dits jusqu’à maintenant, ponctuent les sujets de plaintes des Centrafricains à leur encontre.

Menacées par les violeurs eux-mêmes, les victimes ont peur de parler. Leurs proches redoutent également les représailles de ces Slaves qui ont la réputation d’avoir la gâchette facile. Pourtant, ces faits finissent par exaspérer la population et les langues se délient peu à peu dans le pays de Boganda parce que ces crimes ne doivent pas rester impunis. Dans ses investigations, la rédaction de Corbeau News a pu recueillir des témoignages et des documents attestant de violences sexuelles dans des circonstances précises.

Les villages les plus exposés sont ceux qui sont près des campements russes, où la population se plaint des « virées » des Russes. Ainsi, à Dirgba, un village près de Bérengo, Isabelle G., une jeune écolière de 16 ans, a été violée le 13 mai 2019. La jeune fille a été la victime de contractors russes, qui se font appeler Ricko, Chamane et Djicki. Ce jour-là, ils avaient passé la journée à boire du vin de palme près du village. Dans la soirée, la jeune fille a eu la malchance de croiser le chemin de ces Russes avinés.

Le lendemain, les gendarmes locaux, la victime et son père ont voulu entendre les suspects mais ils se sont vus refuser l’accès au camp de Berengo, qui est devenu le terrain d’entraînement des mercenaires russes. Depuis, ce dossier est en suspend et les auteurs n’ont pas pu être présentés à la justice. Avec le temps qui s’est écoulé, il y a fort à parier qu’ils poursuivent leurs forfaits en Russie ou dans une autre zone de guerre où le groupe Wagner est déployé, que ce soit en Ukraine, en Syrie, au Soudan, en Libye ou ailleurs.

Fin août 2019, c’est un nouveau cas qui est signalé : les témoignages font état d’un certain Melkinov, lui aussi paramilitaire de Bérengo, qui a violé une jeune Centrafricaine de 17 ans. La jeune fille serait désormais enceinte. L’affaire est gênante et Valeri Zakharov, le conseiller « sécurité » du président Touadera, aurait ordonné de tout faire pour que cette information ne soit pas ébruitée. Ses instructions sont claires : rien ne doit se savoir, surtout parmi les journalistes et parmi les représentants de la communauté internationale. « J’espère que Monsieur Valery Zakharov va finir par faire la lumière sur ce viol impardonnable, commis par un de ses hommes présents là-même à Bérengo » confie un proche de la victime qui préfère rester dans l’anonymat.

Les victimes et leurs proches ne se font toutefois guère d’illusion et s’attendent à ce que les autorités russes se murent dans le silence ou pire : qu’ils parlent de consentement des victimes voire qu’ils insinuent un coup monté pour porter tort à leurs intérêts dans le pays. Bien pratique, ce dernier argument est manié avec habileté ces dernières années pour protéger les agissements de la société Wagner dans le pays, à l’image des réponses apportées suite à l’assassinat des trois journalistes d’investigation russes, tués près de Sibut en juillet 2018.

A Bangui comme ailleurs, les habitants aimeraient qu’il n’y ait pas d’autres viols ou d’autres forfaits et comptent sur l’appui des autorités pour s’opposer aux violeurs et à ceux qui les couvrent.

Viols de casque bleus en RCA : des échantillons d’ADN auraient été mal conservés

C’est l’un des « dysfonctionnements » relevés dans l’enquête menée par l’organisation sur 163 possibles cas de crimes sexuels commis par des casques bleus du Gabon et du Burundi.

C’est un rebondissement dans l’affaire des violences sexuelles commises en République de Centrafrique par des casques bleus gabonais et burundais entre 2014 et 2015. Un audit interne des Nations unies, révèle de nombreux dysfonctionnements dans l’enquête menée dès 2016. Ils expliqueraient pourquoi de nombreuses accusations n’ont pu être confirmées, ni pourquoi l’enquête n’a pu réellement aboutir.

C’est une sévère autocritique que le service de contrôle interne de l’ONU – l’OIOS – a mené en diligentant cet audit. En effet, devant la liste accablante d’erreurs, on comprend pourquoi l’enquête sur les soupçons de viols par les soldats de la Minusca, à Dekoa, piétine. On peut craindre aussi qu’une majorité des preuves rassemblées par les enquêteurs, en 2016, ne seront jamais recevables devant un tribunal.

Il y a d’abord des dysfonctionnements d’organisation. L’UNICEF, par exemple, est la première à entendre les témoignages, mais tarde à prévenir l’ONU.

Il y a également le manque de préparation des interrogatoires qui, selon le protocole, a pris de court les 31 enquêteurs dépêchés à Dekoa.

Puis, le rapport pointe des erreurs dans la méthodologie des interrogatoires dont certaines questions pouvaient être « humiliantes » ou « intimidantes » pour les femmes qui témoignaient des viols qu’elles avaient subis.

Enfin, l’audit montre que de nombreux échantillons ADN, preuves primordiales dans les affaires de viols, ont été mal conservés et avaient tout simplement « pourri ».

Finalement, sur les 163 dénonciations, 26 n’ont pas été retenues. Les 69 cas impliquant les soldats burundais ont été requalifiés en relations de « fraternisation » avec des civils, et les 68 cas mettant en cause les casques bleus gabonais sont toujours en attente.

La Minusca affirme mener, depuis quelques mois, une politique de « tolérance 0 » vis-à-vis des casques bleus qui entretiendraient des relations avec des Centrafricaines ou seraient soupçonnés de violences sexuelles. Les sanctions sont immédiates et les soldats incriminés radiés à vie des missions de maintien de la paix.

De nombreuses sensibilisations sont menées auprès des troupes déployées ainsi qu’au sein de la population et toute « fraternisation » est désormais interdite. Un réseau d’une vingtaine d’associations relais, chargées de recueillir les témoignages de futures victimes, a été mis en place par les Nations unies.